mercredi 26 septembre 2012

Femen, slutwalk, le féminisme "nouvelle génération" ?

Deux phénomènes féministes sont actuellement très populaires les médias : les slutwalks et les Femen.
Dans les deux cas, le fond du message est la réappropriation du corps. Il s'agit du refus d'être un objet à exploiter par les hommes pour le plaisir ou la reproduction. Et dans les deux cas, la forme du message fait fantasmer les médias et grincer des dents certaines féministes.

Slutwalks

Les slutwalks sont nées au Canada en 2011, après la réflexion d'un policier qui considère que pour éviter d'être violées, les femmes devraient éviter de s'habiller comme des putes. Les slutwalks ont rapidement essaimé partout dans le monde, y compris en France.
Il s'agit de marches de femmes revendiquant le droit de s'habiller comme elles veulent. Rien ne justifie le viol, ni les vêtements, ni l'attitude : le viol n'est pas un débordement de désir mais un acte de barbarie. Au lieu de blâmer les victimes, donc blâmons les coupables. Pourquoi devrions-nous couvrir nos corps ? Les hommes sont-ils donc des loups affamés qui risquent de nous dévorer si on leur montre un morceau de peau ? Finalement, au delà de la question hautement pertinente de la culpabilisation des victimes, c'est de la réappropriation de nos corps qu'il s'agit : cesser d'être des objets sexuels qui doivent se cacher des uns pour mieux se dévoiler aux autres, cesser de se vêtir en fonction du regard des hommes et marcher libres dans la rue.

La couverture médiatique est au rendez-vous, pensez donc ! Des femmes qui revendiquent l'appellation "salope", dont certaines sont fort court vêtues, ça fait des jolies photos. Le message est clair, on parle de liberté, tout le monde est d'accord, des jeunes filles écœurées d'être harcelées dans la rue aux machos qui salivent à l'idée de pouvoir mater des jambes dénudées. Les rédactions ne prennent aucun risque en publiant des articles sur le sujet. La forme plait plus que les campagnes féministes qui nécessite plus de vingt secondes de réflexion pour être comprises, on suggère le nom de "nouveau féminisme". C'est le féminisme dont le grand public rêve, glamour, fun, pas compliqué, pas violent en apparence.

Pourtant, des questions se posent.
Pour refuser d'être considérées comme des objets sexuels, est-il pertinent de s'en approprier les codes ? Oui, nous sommes toutes d'accord pour dire que la féminité n'est pas à éradiquer, qu'on peut être féministe et féminine. Mais quelle est la limite entre la revendication de la liberté à jouer avec les codes et la promotion d'un certain modèle ?
 Nous nous battons depuis des décennies contre l'obligation à être baisables, disponibles sexuellement. Est-il cohérent, de revendiquer le droit à être sexy ?

Femen

Les Femen nous viennent d'Ukraine. Se revendiquant "sextrémistes", elles jouent avec les médias avec leurs actions seins nus. Arrivées en France à l'occasion de l'affaire DSK, les médias ont exposé avec stupéfaction et délectation les images d'une jeune femme seins sus, déguisée en soubrette, frottant le pavé devant l'immeuble où logeait le couple Strauss-Khan (j'avoue, j'étais pliée de rire).
Il faut une bonne dose de courage pour se montrer seins nus. Il faut surmonter la pudeur, nos seins étant considérés comme des objets de tentation qu'il faut cacher comme des trésors. Il faut aussi surmonter les complexes qu'on nous a imposés en nous répétant que nous sommes imparfaites. C'est aussi faire face au risque de la violence dont les Femen ont bien conscience. Finalement, se dénuder, c'est faire fi des convenances qui nous cantonnent dans un rôle d'objet sexuel comme de l’iconographie populaire qui nous dégoûte de nous-mêmes ; c'est braver les interdits et affronter la violence patriarcale. C'est, là encore, une réappropriation de nos corps.
Tout ça dans une paire de nichons.

Évidemment, montrer des seins permet d'attirer les caméras et de faire parler du mouvement. Sans compter que l'action politique des Femen, qui a valu prison et torture à certaines d'entre elles, leur confère un aura de martyres. Là encore, les caméras se régalent, les journalistes chantent le "nouveau féminisme" ou le "néo féminisme" (la mode du "post-féminisme"serait-elle passée ?). Parce que le féminisme, avant, c'était chiant. C'était porté par des intellectuelles même pas baisables, des avocates hargneuses, des journalistes acariâtres, ou des femmes politiques arrivistes. Maintenant, les féministes sont jolies, on peut les mater. Elles sont couronnées de fleurs comme les déesses de l'Antiquité, et en plus elles sont marrantes.
Les femen le disent elles-mêmes :
"Et puis, le mouvement montre que les féministes ne sont pas toutes enragées, castatrices, poilues et lesbiennes... même si on peut être lesbienne et poilues" (une militante française)
"Nous avons voulu montrer que les féministes ne sont pas que des vieilles femmes cachées derrière leurs bouquins." (Inna Shevchenko, militante en France)
"Le féminisme classique est mourant, les nouvelles générations de femmes ne sont pas intéressées par ce type de féminisme, elles ont peur de dire qu’elles sont féministes. C’est pour ça que nous avons créé un nouveau visage du féminisme." (interview de militantes sur le web)

Je suis tout à fait d'accord pour dire que les femmes françaises ont en général une idée négative du féminisme, comme les hommes, d'ailleurs, et qu'il faut agir là-dessus urgemment (c'est l'objectif de ce modeste blog). Mais est-ce la faute du féminisme "classique" ou de la désinformation ? Est-il pertinent, face à l'inculture, de créer une nouvelle idole plutôt que de faire comprendre et réfléchir des idées somme toute séduisantes et pas très compliquées ? N'est-il pas maladroit, là encore, d'utiliser les codes de la femme-objet (car peu de Femen ont les seins qui tombent) pour dénoncer son existence ?

Les féministes ont toujours tort

De toute manière, quoi qu'elles fassent, les féministes ont toujours tort.

On nous enferme (toujours, quoi qu'on en dise) dans la dualité maman/putain. Il faut être un peu de l'un, mais pas trop, un peu de l'autre, mais pas trop. Cet équilibre casse-gueule, inaccessible, est la cause de tous nos problèmes.
Inévitablement, les médias classent les féministes (réduites à la partie féminine des mouvements) dans un des deux rôles. On a eu le cliché de la mère-la-pudeur, de la bourgeoise qui craint pour sa respectabilité. Les médias, ravis d'avoir des jolies images, nous présentent les féministes-putains, sexys, qu'on peut mater, et qui, avec un peu de chances, seront disponibles sexuellement.

Quelle que soit l'action, quel que soit le groupe qui la lance, c'est toujours "trop".
Trop politique, par exemple, le féminisme, qui devrait être l'affaire de tous et non d'une poignée de femmes rassemblées dans une association, est soupçonné d'être un tremplin vers le pouvoir.
Trop futile, aussi, quand on parle de civilité ou de langage. Bien sûr, la civilité fait partie de l'identité, et le langage façonne notre pensée : c'est loin d'être futile, mais il faut dépasser sa répugnance à remettre en cause ses préjugés pour s'en rendre compte.
Trop racoleuse, vulgaire, crue, la campagne pour la reconnaissance du clitoris...
Trop évidente, la campagne contre le viol, parce que tout le monde est d'accord pour dire que violer, c'est mal. Sauf les 75000 violeurs qui sévissent chaque année, ni la justice qui ne condamne que 1% d'entre eux.

L'avis de chacune d'entre nous, finalement, n'est qu'une traduction de sa manière très personnelle d'être femme. L'avis de chacun d'entre nous, également, n'est que la traduction de son rapport idéalisé avec l'autre sexe. Parce que nous avons toute notre histoire, notre passé, nos envies. Parce que nous avons toutes une vision bien à nous de notre corps, qui influence notre sexualité, notre habillement, et façonne nos convictions. Prostitution, pornographie, GPA, jupe, voile... aucun sujet n'y échappe, les féministes comme le grand public se balancent des épithètes quelquefois colorées, simplement parce que chacun et chacune ressent comme une menace contre sa liberté ou contre son intégrité les avis, quelquefois reposant sur des arguments tout à fait pertinents, de l'autre.


34 commentaires:

  1. Le problème des slutwalks, pour moi, c'est que les "travailleur-ses" du sexe sont derrière.Et moi le discours pro prostitution ou autrement pro esclavage puisqu'on sait bien que la majorité des prostituées sont victimes de trafic, j'adhère pas et je cautionne pas.

    Je soutiens par contre à fond les Femen. Je n'aime pas leur nouveau visuel bleu blanc rouge mais au moins elles sont clairement abolitionistes, il y a des quasi top model mais aussi des beaucoup moins top models dans leurs rangs (et faut vraiment être de mauvaise foi pour leur reprocher de mettre en avant que des militantes jeunes, belles et sexy) et leur courage me laisse sans voix.
    Quand je lis toutes ces "féministes" qui se permettent de les critiquer alors qu'elles défendent vraiment l'abolitionisme et l'égalité je suis écoeurée. On peut être d'accord ou pas avec la forme mais les risques qu'elles prennent méritent au moins du respect.
    Je précise que je ne t'inclus pas dans "ces féministes".
    Je crois que c'est le grave problème du féminisme en France, des groupes qui se tirent dans les pattes.

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    1. Pour ce que j'ai compris, les "pro-sexe" n'ont rejoint les slutwalks que récemment. L'idée d'origine, c'est pas ça. Mais hélas, il y a eu récupération d'une idée bonne à la base.

      Je suis tout à fait d'accord avec toi quant au problème des groupes. Tirer sur les féministes parce qu'il y a toujours un truc qui ne va pas est un phénomène général. Là où ça devient minable, c'est quand nous, qui luttons contre le sexisme, cédons à ce comportement sexiste. Je l'ai fait quelquefois, j'ai eu tort. Maintenant, je préfère sortir mon nez de mon nombril. Chacun sa manière d'agir et de vivre son féminisme. Que chacune dispose d'elle-même !

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    2. La SlutWalk, c’est une manifestation pour la défense des droits de TOUTES les victimes d’agressions sexuelles.
      - Elle rappelle le droit de se sentir en sécurité où que vous alliez, quoi que vous portiez, quoi que vous fassiez.
      - Elle rappelle la nécessité de pouvoir déposer plainte, sans craindre d’être jugé-e, si vous avez été agressé-e.
      - Elle rappelle qu’il n’existe aucune victime de viol « type », aucun violeur « type » et que personne « ne cherche » à être violé-e.
      - Elle participe à la libération de la parole des victimes. Elle est en faveur d’une meilleure communication entre les services de protection et la société dans son ensemble.
      - Elle rappelle l’urgence de ne pas blâmer la victime mais de blâmer l’unique responsable de l’agression : le PRÉDATEUR.
      - C’est un lieu PAISIBLE d’échanges pour inviter les gens au dialogue.
      - En France, c’est l’occasion de réclamer des moyens concrets au gouvernement pour lutter contre le sexisme et prendre de nouvelles mesures pour la prévention, l’éducation, l’accompagnement des victimes et le suivi des criminels sexuels.

      La SlutWalk est un mouvement qui lutte contre : le sexisme sous toutes ses formes, la culpabilisation des victimes d'agressions sexuelles et le dénigrement du viol. Tout le monde est invité à marcher avec nous. Quels que soient votre : genre, âge, orientation sexuelle, physique, style de vie, croyances, métiers, CSP… Vous êtes bienvenu-e !
      - Il n’y a pas de « dress code » spécifique. Les participant-e-s sont invités à venir dans les vêtements dans lesquels ils se sentent à l’aise. Jupe, corset, talons aiguille, jean’s, baskets, T-shirt…
      - La marche étant ouverte à TOUS, elle se veut consensuelle, politiquement neutre et tolérante. Ce n’est pas l’occasion d’imposer violemment aux autres un style de vie, une orientation sexuelle, des croyances ou des idées politiques…. Tout le monde doit être à l’aise et passer un bon moment !

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    3. Merci pour ces précisions !
      C'est dommage que vous n'ayez pas signé votre message... Êtes-vous organisatrice, organisateur, de la slutwalk ? Participant-e ?

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    4. bonjour,

      "Pour ce que j'ai compris, les "pro-sexe" n'ont rejoint les slutwalks que récemment." : pourriez vous donnez plus de précisions svp ?
      merci !

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    5. Dans les explications liées aux premières slutwalks que j'ai lues quand le phénomène a été lancé à Totonto, je n'ai lu aucune référence une position par rapport à la prostitution. Ce n'est que lors de la première slutwalk à Paris que j'ai lu quelque chose sur le sujet : des interviews de personnes revendiquant la liberté d'être des salopes et de se prostituer. Je n'ai jamais pensé que de telles déclarations étaient représentatives du mouvement au niveau mondial, ceci dit.

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    6. En effet il faut être prudente : le seul message officiel de la slutwalk est celui-ci-dessus. Après si l’une ou l’autre personne déclare autre chose, il en va de sa responsabilité individuelle. Je pense que c’est important, comme tu le dis souvent, de ne pas se tirer dans les pattes, on veut toutes la même chose : l’égalité.
      C’est une initiative pacifique et festive pour dénoncer la culpabilisation des victimes, quelles qu’elles soient. Aucun autre message que celui-ci ne sera autorisé à apparaitre. Ce n’est pas le lieu de pro ceci ou d’anti cela.
      C’est une marche qui s’organise le 6 octobre dans le monde entier et dans plus d’une dizaine de villes en France, venez défiler habillés-es comme vous vous aimez !

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  2. Moi je n'ai pas aimé leur affiche sans tête. C'est le genre de visuel que pondent généralement les machos et cela me dérange. Mais sinon je pense qu'elles doivent absolument être soutenues.
    Si elles viennent en France c'est aussi parce qu'il y a un certain dynamisme féministe à l'oeuvre dans ce pays et qu'il y a du potentiel pour leur combat. Par contre demander aux féministes autochtones de se déshabiller n'a pas été pris avec l'humour que l'on aurait pu espérer. Cela vient sans doute de leur détestable affiche.

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    1. Je suis à 100% d'accord avec toi. L'affiche était une honte. Je veux croire que c'était une maladresse...

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  3. ah ben tiens, ça tombe bien ce sujet poarce que je réfléchissais à cette question de la réappropriation du corps et des représentations sociales de la nudités corporelles.
    je suis né en 1960. j'ai donc vécu mon enfance en regardant les révolutions hyppies qui avaient lancées déjà ce type d'action que reprennent admirablement bien les femen. mais là, à l'époque des hyppies, il y avait autant d'hommes que de femmes à manifester nus et tous et toutes recherchaient aussi à construire toute une esthétique nouvelle de féminité pour tous les genres et les sexes.
    moi dans ma tête et mon coeur, je suis resté attaché à ces représentations là, nues, colorées, florales et végétales, cheveulues, maquillées et je vois les yeux horrifié depuis trente ans les représentations sociales de l'hommes et de la femme être conquises par l'idéologie phallocrates dans laquelle la femme est obligatoirement prostituée dans sa fonction comme dans son image et l'homme un prostitueur uniformisé et sans corps, le crâne rasé et les lignes serrées dans un costard FBI.

    Ainsi, je pense que votre réaction, que je ne critique pas ni ne conteste, est influancée par votre époque et votre âge.

    ceci dit, la culture psychédélique a été noyée et totalement récupéré par les maîtres du monde, en parfait paranoïaques mùanipulateurs des foules, ayant tous les moyens nécessaire pour arriver à cette fin d'écrasement de cultures et de construction d'une autre : ils ont aussi bien réussi à revisiter l'histoire afin d'établir l'image démocratique indépassable du capitalisme contre les communismes et les anarchies de la même manière que les autres tentatives de reconstructions culturelles des identités sexuées et du féminisme.

    ça va très loin leur réussite puisqu'ils ont réussi à vous mettre dans la tête que le modèle prostituée/prostitueur était indépassable et génère chez nous un questionnement plein de doute voire de complexe à l'égard de la stratégie spectaculaire des femen.

    pour les slutwalk, j'ai moi-même mes propres doutes de cet ordre qui me ramènent plus à une autocritique qu'à une critique de leurs actions et de leur évolution. la question du raliement des pro-prostitution à leur mouvement est néanmoins très préoccupante et jette une ombre en effet.

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  4. Oui, les slutwalks c'était une bonne idée au départ mais vu que ça a été récupéré très vite et il me semble sans trop de difficulté par le système prostitueur je me dis qu'à la base leur revendication ne devaient pas si claires que ça. C'est un problème de fond là avec la prostitution au milieu. Les Femen, on peut y voir un problème de forme mais dans le fond, les grands principes d'égalité féministes sont là.
    Comme Euterpe je trouve que leur affiche est ratée. Pourquoi ne pas avoir mis sur l'affiche des femmes diverses, de toutes les tailles et formes et entières comme le sont les militantes?
    J'ai lu Euterpe qui parlait je ne sais plus où de la différence de culture et de perception de la nudité dans les pays de l'Est et je suis entièrement d'accord. C'est aussi pourquoi je leur souhaite bon courage en France où tout est complètement différent. Il leur faudrait s'adapter à la société française mais en même temps, peuvent-eles bousculer les mentalités si elles ne font pas de vagues?

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    1. Je rêve de changer les mentalités par l'éducation, avec douceur, sans blesser, sans bousculer. Mais je sais bien que ce n'est pas possible. Les Femen ont une forme qui potentiellement peut fonctionner, en particulier en France. On en a bien besoin. Mais je crains une récupération, comme celle qui a lésé les slutwalks. Il serait facile de déformer leur discours en une revendication de la liberté à se laisser mater...

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    2. "ça a été récupéré très vite et il me semble sans trop de difficulté par le système prostitueur" pouvez vous apporter des précision svp ? merci

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  5. Je fais sans doute partie de "ces féministes" qui critiquent les Femen... Pourtant, j'aime pas trop non plus qu'on se tire dans les pattes. Mais...

    1/ Première chose, je ne suis pas absolument certaines qu'elles soient abolitionnistes.. J'ai entendu des choses contradictoires à ce sujet.
    Après, si quelqu'un a des sources précises à ce sujet, je suis preneuse.

    2/ Une des premières choses que les Femen ont faite en débarquant en France est de critiquer les autres assoc'... Ce qui m'a passablement énervée...

    3/En tant que femme qui a été très très longtemps super complexée, et qui a beaucoup souffert des normes de beauté, je trouve la démarche aphrodique* des Femen insultante, à mon égard, mais aussi à l'égard de toutes les femmes. Je m'explique : quand je vois des affiches de pub avec des corps parfaits (et photoshopés), je me sens insultée, car ces affiches me disent en substance "tu es moche, tu es imparfaite, tu ne vaux rien"... Ben quand je vois les affiches des Femen, je vois pas la différence avec ces affiches de pub : des corps lisse, mince, jeune, souvent objectivisées (pas de tête)... Faudrait-il être un canon pour être une vraie féministe, selon les Femen ?
    Bref, pour moi, elles usent d'une démarche super machiste... le comble pour des féministes !
    Vraiment, d'habitude j'aime pas critiquer les féministes et je pense qu'il faut être solidaire, mais là, c'est trop pour moi !

    * aphrodique, d'aphrodisme, système de domination des "beaux" sur les "moches", et qui est particulièrement lourd pour les femmes.

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    1. Pour le 1/, tu devrais trouver des articles facilement à propos de leur action pendant la Coupe du Monde de foot. Elles dénonçaient la prostitution en marge du la Coupe et j'ai lu un discours clairement abo, il me semble.

      Je suis d'accord avec le 2/. Mais la critique touchait surtout la forme des actions, non ?

      En ce qui concerne le 3/, enfin, si personnellement je n'ai vu que des canons dans les actions médiatisées de Femen, ça peut aussi être un choix des journalistes. Je ne sais pas trop, à vrai dire...

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  6. Juste un mot. J'ai l'impression après avoir travaillé durant 40 ans sur cette idée du respect, que ce sont souvent des femmes qui se sentent "moches" "pas dans les normes" qui protestent contre le fait que les Femen (juste comme exemple) sont des filles Top (ce qui est souvent faux dans la réalité). Pour contrer réellement ce fait, il suffirait que chaque femme puisse être représentée (comme n'importe quel homme aussi),mais la plupart qui ne se sentent pas ans la norme (couverture de magazine féminin) refusent de se montrer ou photographiées, donc elles alimentent elles-mêmes le discours. Il y a la place de vivre pour tous et toutes. Le fait de se dire complexée n'est pas suffisant. Il faut vaincre ce complexe et alors on s'aperçoit qe la vie est plus simple.

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    1. Evidemment que ce sont les femmes ""moches"" qui protestent contre les normes de beauté, car ce sont elles qui sont les plus durement touchées par ces derniers.
      Ensuite, je n'ai pas parlé de l'apparence des femen elles-mêmes, mais de leurs affiches et de notamment celle-ci http://www.madmoizelle.com/wp-content/uploads/2012/09/vfE7hBcPYu.jpg

      Enfin, je trouve ça hyper cynique de reprocher aux femmes ""moches"" leur propre oppression ><. Peut-être que si elles ont peur de se montrer, c'est bien parce qu'on s'est déjà foutue de leur gueule à cause de leur apparence.

      Bref, ce discours oppressée en tant que responsables de leur oppression m'énerve très très grandement

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    2. merci antisexisme pour le lien vers l'affiche des femen que je ne connais pas
      ben ça m'a très désagréablement surpris
      j'y ai reconnu tous les archétypes visuels du front national
      !!!!
      ça craint !

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  7. Merci Alice. Toi qui a vécu au Danemark tu sais que la nudité n'est pas considérée partout dans le monde comme aussi intime et privée qu'en France. Cela me fait plaisir que tu confirmes parce que je me sens un peu seule parfois quand j'avance ce genre de chose sur des blogs français.

    Je te comprends antisexisme mais je suis aussi d'accord avec l'importance de la réappropriation de son corps.
    Personne ne va nous rendre notre corps si nous ne le reprenons pas nous-même.
    Moi je n'ai pas vingt ans mais je crois que j'ai fait assez de chemin avec mon corps (mais c'est vrai que la France est un endroit un peu sclérosant pour effectuer ce genre de travail) pour m'imaginer manifester seins nus si cela peut secouer le patriarcat.
    Sur mon blog, je fais un inventaire des actions seins nus dans l'histoire et il en ressort qu'ils symbolisent la liberté, sont une arme contre la calomnie, renouent avec la nature du corps (nous ne sommes pas nées avec des vêtements), se moquent des valeurs bourgeoises, bref...la nudité rue dans les brancards.
    Apparemment il y a un mouvement topless mondial en ce moment : http://sociedad.elpais.com/sociedad/2012/09/26/actualidad/1348624628_861935.html

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    1. Euterpe,

      La nudité en soi ne me gêne pas... Et au fond, je suis même plutôt favorable à des manifestations seins nus, si cela peut permettre de desexualiser cette partie du corps. En effet, je trouve ça injuste que les hommes puissent se balader seins nus et pas les femmes.

      Ce qui me gêne par contre, c'est le fait que sur leurs affiches, il n'y a que des filles canons, parfois sans tête, qui ont l'air interchangeables ! Bref, de parfaits objets sexuels.
      http://www.madmoizelle.com/wp-content/uploads/2012/09/vfE7hBcPYu.jpg

      C'est bien les normes de beauté, et l'objectivisation, qui me posent problème, pas la nudité.

      Après je veux bien admettre que le contexte ne soit pas le même qu'en France... Mais pour moi, ça, ça passe pas.

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    2. Par contre se radicaliser un peu, faire des happenings et se démener une peu plus pour obtenir par exemple une loi antisexiste, ne serait pas du luxe. On n'obtiendra pas de changement en rouspétant juste derrière son écran.
      J'ai démontré sur mon blog que la subversivité féminine existait même via les seins nus et qu'elle a été méchamment pervertie.
      Ce serait sympa de venir faire un tour lire ma démonstration (Kalista,Alice et les autres sont aussi cordialement invités bien entendu).

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    3. J'ai suivi ta série avec attention, j'attendais de voir si tu nous parlerais de Lady Godiva ! ;-)
      Quant aux happenings, je n'y crois qu'à moitié. Les médias savent trop bien les détourner et le font avec une méticulosité qui me décourage totalement. Il en faut, bien sûr, mais conserver ceci comme un unique moyen d'action, ça ne servira qu'à nous faire passer pour des mégères.
      Je crois à une action politique, en utilisant les armes des hommes. Je crois à l'éducation, surtout. Et pour cela, j'essaie de persuader mes lectrices et mes lecteurs qu'il y a un problème dans notre société (mon rêve serait d'écrire un grand roman féministe qui entre ne résonance avec les sentiments des femmes et émeuve les hommes... ah, si j'avais du temps, de l'énergie et du talent !). Antisexisme, de son côté, convainc des centaines de personnes par ses articles rigoureux scientifiquement. Nos approches sont, je pense, complémentaires. On ne changera pas le monde, mais on peut au moins faire réfléchir quelques personnes.
      Si on veut changer cette société, il faut être de tous les fronts. Aux Femen et à la Barbe les happenings qui font sourire puis réfléchir. A OLF la politique. A nous le web.
      Ceci dit, je me ferais bien une petite slutwalk ce week-end...

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    4. Ah mince lady Godiva ! Mais pourquoi ne me l'as-tu pas écrit ? Je n'ai fait qu'attendre un petit coup de main des copines, moi !
      Il va falloir que je l'ajoute à ma série, du coup !

      Je suis bien d'accord avec toi sur le roman. Le problème est que les romans écrits par des femmes ne sont pas médiatisés comme ceux des hommes. Et les hommes ne sont émus que si ont leur présente un roman primé et les romans primés sont ceux des hommes, etc...
      Sinon tu es quand même pour les happening, alors ! :)

      Oui, voilà : il faut être sur tous les fronts. C'est aussi mon avis.

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    5. Et à propos de collégialité, un petit détail sans importance, certes mais je voulais tout de même te dire que j'apprécie beaucoup ton blog néanmoins j'aurais tout de même préféré avoir un commentaire de toi sur ma série chez moi plutôt que d'avoir à venir le chercher sur ton blog, non ?

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    6. Depuis un an à peu près, j'ai cessé de poster des commentaires, sauf cas de force majeure. Depuis que j'ai pris mon nouveau poste, j'ai très peu de temps, donc je lis les blogs qui m'intéressent via un reader dans les transports et je ne prends pas le temps de commenter. Ca me prend beaucoup de temps, les commentaires, en fait, je réfléchis beaucoup avant d'écrire.
      Je réponds aux commentaires sur mon blog et ça s'arrête là. En général, quand j'ai fini de répondre, je dois courir finir ce que j'avais en plan ou prendre un train. D'ailleurs...

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  8. C'est le propre d'une domination et d'une discrimination que ce sont les victimes elles-mêmes qui s'autocensurent.
    Au delà je pense qu'il y a une spécificité française autour du mythe de la "femme française" et peut-être de la mode. Quand on regarde les actrices françaises, il y en très peu qui ont un physique particulier (très expressif mais qu'on considère comme moche)alors que quand on regarde le royaume-uni, l’Espagne, la majorité des grandes actrices populaires ont un physique particulier et n'ont pas des rôles de moches mais normaux. Vaincre un complexe est particulièrement difficile face à la norme inconsciente imposée.
    Cela touche aussi la façon de s'habiller. En se baladant à Paris, nous sommes tous habillés de la même façon, l'originalité est remarquée et moquée alors qu'à Londres personne ne remarquera qu'une gothique s'est assise à côté de lui dans le bus.
    Récemment j'ai regardé la photo de classe de lycée du petit frère d'une de mes amies de 4 ans notre cadet. Toutes les jeunes filles étaient "féminines" en ballerine et en jean slim. Il fallait une grande personnalité pour être en jogging. On a ressorti notre propre photo de la même époque et on était toutes en jogging et basket. Il fallait une grande personnalité à l'époque pour assumer une mise féminine.

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  9. Pour ajouter, il y a une chose qui m'a particulièrement interpellé lors du débat sur le voile intégral. En gros, certains justifiaient le voile par "pudeur, pour qu'on ne remarque pas notre physique, qu'on nous ne fasse pas des commentaires".
    La réponse appropriée aurait été mais "vous n'avez pas à vous faire agresser si vous sortez tête nue, c'est votre droit de vous habiller comme bon vous semble sans qu'on ne vous déshabille ouvertement du regard ni à subir les remarques dans le rue".
    Sauf que la majorité des éditos écrits par les bien-pensants hommes blancs CSP+ étaient plutôt "mais c'est notre droit à nous les hommes de pouvoir regardez les femmes dans la rue, à vous mater, que le monde serait triste si on ne pouvait plus voir de jolies gambettes l'été". Je n'exagère pas je paraphrase presque.
    En gros ils donnaient raison à ceux qui étaient pour le voile intégral mais en justifiant par leurs propres droits plutôt que par celui des femmes.
    Comme la remarque d'un homme politique sur le robe de Duflot "elle n'avait qu'à pas se mettre en robe si elle ne voulait pas être admirée". Vous remarquerez quel magnifique sens donne-t-il au mot "admirer" et je suppose que cet homme est totalement contre le voile intégral.
    C'est pour ça que je pense que malheureusement ce type de mouvement féministe est plutôt négatif en France parce que le rapport aux corps des femmes est UNIQUEMENT sexualisée. Le message de fond ne passera jamais.

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    1. @ lyly : oui c'est ce qu'il faut changer. Cette sexualisation du rapport au corps. Il nous est imposé par la pub et l'industrie pornographique depuis les années 80.
      Si nous revenons au message de la nudité comme cri de liberté, on ne peut plus nous parler d'érotisme, d'"admiration". Le corps des Femen est peint de slogans. Les féministes sudaméricaines peignent leur corps de couleurs et de fleurs.
      Bien sûr la publicité qui exploite la rebellion féminine depuis les années 70 va de nouveau récupérer ces images pour vendre des produits. A Berlin, j'ai déjà vu une pub avec un torse féminin nu avec des marques commerciales peintes en noir sur la peau comme les slogans des Femen. Mais tout cela il faut le dépasser.
      Pour l'uniformité des looks français, c'est très vrai.
      Néanmoins Théroigne de Méricourt était française. Joséphine Baker s'est produite de préférence en France. Le MLF est né en France. Les Femen ont choisi la France...La France reste associée à la Révolution pour tous les peuples non-français. Ils attendent tous l'impulsion révolutionnaire française. C'est paradoxale mais c'est comme ça.

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    2. Je suis totalement d'accord avec toi lyly.
      La "question" du voile, en France, n'est à mes yeux rien d'autre que des hommes se demandant quel modèle il faut imposer aux femmes : dénudée et consommable ou cachée et soumise. Vous pouvez me trouver catégorique et réductrice, mais j'assume.
      Et ce que j'espère de Femen, c'est une alternative à cette dichotomie : être nue, oui, mais pas pour le plaisir des hommes.

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  10. hypothèse : pour les autres peuple, le peuple français est le plus coincé, sclérosé qui soit, conformiste et traditionnaliste.
    donc si le peuple français bouge, tous les autres bougeront facilement
    d'où leur attente que le peuple français bouge et fasse une révolution...

    euh...
    le peuple français vote front national et ump majoritairement, le ps n'a rien de socialiste et de gauche... mais tout du club d'arriviste bon teint

    donc

    j'ai des doutes

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  11. Merci pour cet excellent article! :)
    Je reste assez dubitative par rapport à cette "nouvelle forme" de féminisme que je perçois (à tort, j'espère) comme édulcoré. Certaines féministes anglo-saxonnes appellent ça le "fun-feminism". Un féministe très individualiste (mon choix prime sur le reste) et qui surtout se doit de rassurer la population qui ne l'est pas. Bref, j'accroche pas, je dois bien le dire, même si, comme Antisexisme, je n'aime pas qu'on se tire dans les pates.

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  12. Antisexisme, on est bien d'accord sur l'affiche: elle est complètement ratée. J'aurais bien vu à la place une photo de militantes non retouchée. Et d'autant plus qu'il n'y a pas que des super bien foutues (en tout cas bien foutue selon les critères patriarcaux) parmis elle. Peut-être ont-elles voulu casser le stéréotypes de la féministe qui est obligatoirement moche et poilue? Je n'en sais rien et de toute façon c'est maladroit.
    Je n'aime pas non plus qu'elles critiquent les autres assoc mais elles ont été tellement critiquées elles-mêmes et ce dés le début alors qu'elles ont quand même été torurées et ont risqué leur vie à plusieurs reprises que bon...

    Euterpe, au Danemark, dès que le soleil de printemps pointe son nez, les seins nus s'affichent jusque dans les parcs publics. A la plage pas de souci si on a oublié son maillot. Et on y voit autant de canons que d'obèses poilues. Personne n'y fait attention. A part si,quelques touristes.
    Je me souviens d'une fois dans un bar de Copenhague. J'étais seule à ma table avec mon café et à la table à coté des touristes, que des gars, dont un s'est mis à faire des commentaires en français sur ma petite poitrine. Il croyait sans doute que j'étais danoise ou en tout cas pas francophone. Il devait croire aussi que les danois-e-s sont nul-le-s en langue parce que une des serveuses qui était juste à coté s'est mise a le fixer genre "t'as un problème avec nos nibards?". Le gars s'est arrêté net et je me suis sentie tellement soutenue, je l'ai sentie concernée elle aussi alors que les com étaient clairement pour moi (on avait pas le même taille de soutif)!
    A mon retour en France et sur Paris des commentaires comme ça pleuvait au quotidien, bien en face de moi avec tout le monde qui écoute avec complaisance, voire même un petit sourire en coin. Dégueulasse.
    Après je ne dis pas que tous les français sont comme ça mais c'est quand même quelque chose qui se remarque et c'est aussi pourquoi j'ai peur que les Femen n'arrivent pas y faire passer leurs idées et leur message.

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  13. @ Alice : oui le matage et jaugeage du corps de l'autre c'est un sport national französisch. En Allemagne, pareil. Les gens se mettent en slip dans les parc dès qu'il y a un rayon de soleil et n'en profitent pas pour se mater comme des malades comme en France.
    Moi je me sens très mateuse parce que j'ai été élevée en France. J'ai beaucoup de mal à détourner le regard mais je me force.
    Une élève allemande à moi (quand j'enseignais) m'a dit qu'elle était assez indignée de la manière dont les hommes matent les femmes sur les plages francaises. Elle me racontait qu'elle avait fixé des mateurs pour qu'ils soient gênés d'être surpris en train de mater et à son grand étonnement ils ne se sont pas du tout sentis gênés. Cela l'a indignée encore plus.
    J'ai dit "oui je sais mais à part ca pour les francais ce sont les autres les puritains, hein"
    Ici, je vais dans un centre sportif où je vois des femmes pas canons le moins du monde c'est le moins qu'on puisse dire et vachement vieilles en plus, qui pourraient être ma mère et pourtant je ne suis vraiment pas jeune moi-même et ces femmes n'ont tellement pas de complexes qu'elles se font tatouer, piercer les tétons, raser la foufoune + portent des tangas. On n'imagine mal cela en France.
    Je suis parfois vraiment épatée. Cela dit, ce n'est pas féministe et c'est un peu jeuniste comme attitude, mais quand même cela prouve qu'elles n'ont pas le moins du monde honte de leur corps.
    En France, avec le matage institutionnel, dès que l'on n'a pas un corps parfait, on se cache de peur du terrorisme qu'implique cette critique systématique de la moindre imperfection.

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  14. que l'on nous fait subir. (il manquait la fin de la phrase).

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