mardi 8 février 2011

Autoriser pour contrôler

Il y a des choses qu'on ne peut pas contrôler. Alors beaucoup se demandent s'il ne vaut pas mieux encadrer les pratiques.

La drogue, par exemple, est un problème qu'on n'arrivera jamais à éradiquer.
Les drogues font l'objet de trafics ; les drogués sont victimes d'abus de la part des trafiquants. Les drogues sont consommées dans des conditions sanitaires déplorables ; les substances elles-mêmes contiennent des additifs qui agravent leurs effets. Et ne parlons pas de l'insécurité générée par les trafics et la prise de drogues sur la voie publique, au vu et au su de tous.
C'est cette dernière raison qui est à l'origine de l'idée des salles de shoot. Mais on pourrait aller plus loin en fournissant carrément les drogues (peut-être moyennant finances) aux drogués. Ils pourraient consommer des drogues de qualité contrôlée, dans des lieux sécurisés, à l'abri de la violence des trafics. Les trafiquants n'auraient plus qu'à mettre la clé sous la porte et les riverains, surtout les enfants, n'auraient plus à subir l'insécurité liée à la drogue.
Evidemment, ça veut dire que l'Etat devient dealer, et je comprends que l'idée paraisse choquante. Mais c'est pour la protection des drogués.

La violence physique est un autre exemple de phénomène dramatique qui ne disparaîtra jamais.
Certaines personnes n'arrivent pas à contrôler leurs pulsions violentes et tabassent ceux et celles qui leur tombent sous la main. Si on arrivait à trouver des volontaires (les masochistes, ça existe), moyennant une rétribution généreuse, les personnes victimes de pulsions violentes pourraient évacuer leur colère sur eux. La prestation serait évidemment codifiée et contrôlée pour rester dans des limites raisonnables. La santé des généreux volontaires serait étroitement surveillée. C'est une idée difficilement tolérable, mais les masochistes sont libres de se laisser frapper, non ?
On peut aller jusqu'au meurtre, comme ça. Pourquoi ne pas mettre en contact les suicidaires et ceux qui ressentent le besoin de tuer ? On pourrait sauver des vies grâce à de telles institutions. Tout le monde serait content.


Je me demande à quel moment vous avez commencé, en lisant ce qui précède, à vous dire que j'avais pété un boulon (le choix des illustrations a peut-être aidé...). Je me suis dit la même chose à propos du délire de Chantal Brunel sur les maisons closes. J'ai juste transposé l'idée dans un autre contexte ; pourquoi ce qui parait absurde dans le cas de la drogue, de la violence, du meurtre, est-il tolérable dans le cas de la prostitution ?
Pour ceux qui n'ont pas suivi l'affaire, ça fait un an que Mme Brunel parle de rouvrir les maisons closes (mais comme ces maisons ont un historique et une connotation glauque, elle préfère parler de maisons "ouvertes" - j'ai juste envie de dire lol, quoi) pour mettre les prostituées en sécurité. Que le Mouvement du Nid ne soit pas d'accord, ça n'a rien de surprenant, mais il faut relever que le syndicat des travailleurs sexuels, le STRASS, n'est pas d'accord non plus (cf cette interview dans le JDD). Malgré l'opposition, faits à l'appui, (quoique pour des raisons et avec des objectifs différents) de ces groupes qui savent quand même un minimum de quoi ils parlent, Mme Brunel récidive ces jours-ci dans Marianne. Heureusement que le magazine a pris la peine d'opposer à ce discours celui de Caroline De Haas.
Non, l'institutionnalisation n'empêche pas le trafic, au contraire elle l'encourage en légitimant la demande. C'est bien à cette demande qu'il faut s'attaquer. Ca marche, la Suède l'a prouvé, la Norvège a suivi, l'Irlande va sans doute s'y mettre aussi. Alors qu'est-ce qu'on attend ?

4 commentaires:

  1. Je ne mets pas sur le même plan les drogues et tout ce qui concerne les humains. Mettre à disposition des substances même nocives n'est pas la même chose que mettre à disposition des individus.

    Alors que je suis de plus en plus favorable à la mise à disposition des drogues dures (en pharmacies ou autres) en vue d'ôter le pain de la bouche des réseaux mafieux de manière certaine (cf. l'alcool tout aussi dangereux pour lequel il n'y a pas de trafic), je ne peux concevoir que l'on mette à disposition des personnes (ventre, sexe, organes) dans l'optique d'assouvir les caprices de certains.

    D'un côté on a des matières/substances inanimées qui répondent à une addiction (pathologie, souffrance); de l'autre on a des êtres humains, animés et sensibles, censés répondre à des désirs socialement construits et qui ne constituent pas de nécessité (avoir un enfant, une relation sexuelle, etc.).

    Sinon, évidemment je suis tout à fait d'accord avec toi sur le danger que constituerait une légalisation de la prostitution.

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  2. Franchement, sur les salles de shoot, je n'ai pas d'avis tranché. Je trouve l'idée choquante mais les arguments pour ne sont pas idiots. J'attends d'avoir plus d'éléments pour juger, en particulier des retours des pays l'ayant instauré.
    Le parallèle avec les maisons closes n'est pas rigoureux. La prostitution est un phénomène unique qu'il est difficile de comparer à une autres situation. On peut trouver des points communs dans les argumentaires, c'est tout. Il y a l'idée de contrôler pour sécuriser les pratiques, qui n'est pas absurde dans le cas de la prise de drogues mais le devient dans le cas de la prostitution, il y a l'idée de cacher les drogués et les prostituées aux yeux des riverains aussi.

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  3. Je me suis doutée assez vite que tu parodiais (même si effectivement comme le souligne les 2 autres commentaires, cela peut emmener sur d'autres terrains) ... donc je reste sur celui de la prostitution :

    Heureusement que C. de Haas a été interviewée aussi, ça fait entendure une autre voix, respectueuse des droits des femmes. Ch. Brunel, veut montrer qu'elle n'est surtotu pas féministe, elle y parvient très bien ! merci pour le 'twit' car je n'avais pas eu l'occasion de lire Marianne.

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  4. Je découvre l'article via ton module de "posts au hasard" et ça tombe plutôt bien: est prévu cette semaine sur WM un article concernant l'éventuelle légalisation des drogues, les salles de shoot etc. Et je rejoins Héloïse dans son commentaire à ce sujet.

    Cela dit, l'approche que j'ai de la question serait plutôt de l'ordre de: ce n'est pas contre la drogue qu'il faut lutter, ni contre les trafiquants, mais contre l'addiction, qui est le point de départ du cercle infernal. Traitons l'addiction, donnons les moyens au toxicomanes de sortir de la spirale, et les trafiquants n'auront plus qu'à fermer boutique.

    On s'obstine à considérer les consommateurs comme des délinquants alors qu'ils ne sont que des gens malades. Et en ce sens, ce n'est pas de répression ou de lois dont ils ont besoin, mais de soins. Et de prévention.

    Bref, j'arrête sinon t'auras tout mon article, c'est naze^^.

    ++

    WM

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