jeudi 27 janvier 2011

Appel pour une victime de viol en grand danger

Il ne faut des fois pas grand-chose pour changer une vie.

Aurélia est une patiente du docteur Muriel Salmona. Victime de viols collectifs à deux reprises et ayant porté plainte, elle vit sous la menace constante de représailles depuis 6 ans. Un relogement hors de son département est indispensable pour sa sécurité physique et psychique.

Je vous encourage à lire l'histoire d'Aurélia, rapportée en détails par le docteur ici et .
Pour résumer, elle a été victime d'un viol collectif à 14 ans et, suite à la plainte déposée par sa mère, en a subi un second deux ans plus tard. Ses tortionnaires ont été jugés et condamnés, mais depuis 6 ans elle reçoit constamment des menaces de mort et de viol.
Les conséquences des viols sur la santé physique et psychique d'Aurélia ont été désastreuses, mais sa prise en charge médicale n'a pas été adéquate, la jeune fille ayant été plutôt traumatisée que soulagée par les traitements qui lui ont été imposés. La police n'a pas toujours été efficace : pour les menaces, ils n'ont accepté que le dépôt d'une main courante et non d'une plainte. Enfin, la seule réponse qui a été apporté à sa détresse par les services sociaux est le placement. Elle a été séparée d'une famille qui la soutenait, sans être protégée des menaces. Elle a aujourd'hui 20 ans et ne pourra plus, l'an prochain, recevoir l'aide des services sociaux. Ses agresseurs doivent sortir de prison bientôt. Aurélia est en grand danger.
Sa mère, qui ne peut plus travailler suite au stress provoqué par les agressions que sa fille a subies, vit avec le RSA dans un HLM. Bien qu'elle aie toujours payé son loyer, ses demandes pour un nouveau logement n'ont jamais été acceptées par les HLM. Le docteur Salmona a donc lancé une pétition pour faire bouger les choses.

Lettre ouverture de soutien pour une victime de viols en grand danger

Il suffit d'une petite signature de votre part pour changer une vie. Pour une fois, nous ne sommes pas impuissants.
Signez cette pétition et relayez l'appel du docteur Salmona. Il faut pousser les HLM à réagir. Et si cette histoire pouvait permettre d'alerter l'opinion publique quant à la prise en charge inadéquate des victimes de viols, ce serait aussi un grand pas en avant...

A lire aussi : l'appel de Sandrine Goldschmidt sur A Dire d'Elles.

mardi 25 janvier 2011

Nom de nom

Un article de 20 Minutes aborde un sujet qui me met hors de moi : le changement de nom d'une femme lors de son mariage.
Le titre sous-entend déjà une idée fausse : "Les épouses préfèrent garder leur nom". Les épouse gardent toujours leur nom, le mariage leur permet juste d'utiliser en plus le nom de leur mari, si elles le désirent. Et les époux peuvent également utiliser le nom de leur épouse.
Je lis dans cet article : "la transmission automatique du nom de l'époux lors de l'union n'a plus force de loi comme auparavant. Selon BVA, si elles se mariaient cette année, seulement 46% des femmes accepteraient de prendre le seul nom de leur époux comme nom de famille". Encore loupé ! Cette transmission n'a jamais été automatique, en tout cas pas depuis la Révolution Française (avant, je ne sais pas). Seule la tradition l'imposait. Ces femmes qui aimeraient ne pas utiliser le nom de leur mari sont libres de ne pas le faire, même si elles sont mariées depuis longtemps. Il faudra juste qu'elles se battent contre toutes les administrations et services qui ignorent la loi.

Nul n'est censé ignorer la loi, il parait. Pourtant je ne connais presque personne qui soit au courant de ces lois qui datent pourtant de la Révolution.
La loi est très bien expliquée par Maître Eolas et le site du service public (ici et ).
La loi du 6 fructidor de l'an II stipule que "Aucun citoyen ne pourra porter de nom ni de prénom autres que ceux exprimés dans son acte de naissance" : porter ne nom de son époux est donc, quelque part, hors la loi. Les contrevenantes sont passibles de sanctions lourdes :"six mois d'emprisonnement et à une amende égale au quart de leur revenu. La récidive sera punie de la dégradation civique". L'article 4 ajoute que l'administration n'a pas le droit de vous appeller par un autre nom que le vôtre, "il est expressément défendu à tous fonctionnaires publics de désigner les citoyens dans les actes autrement que par le nom de famille, les prénoms portés en l'acte de naissance [...] Les fonctionnaires qui contreviendraient aux dispositions de l'article précédent seront destitués, déclarés incapables d'exercer aucune fonction publique, et condamnés à une amende égale au quart de leur revenu" (la prochaine fois que les impôts me font chier à m'appeler par le nom de mon mari, je leur envoie ce texte).
La circulaire du 26 juin 1986 rappelle également les règles en vigueur :"Le mariage n'opère aucun changement du nom des époux". Nous sommes libres d'utiliser ou non un nom d'usage, mais si on choisit de le faire, il faut en faire la demande, justificatifs à l'appui : les administrations et services qui appellent les femmes mariées par le nom de leur époux par défaut sont dans leur tort. Enfin, le nom d'usage n'a rien à faire sur les papiers d'identité : si une banque ou un employeur vous reproche de ne pas faire figurer le nom de votre époux sur les papiers d'identité, il est dans son tort.

Les questions de nom de famille des époux ne me parait pas anecdotique et ne doit pas, à mon avis, faire l'objet d'un traitement si léger dans les médias. Certes, il est important que les deux époux aient les mêmes droits et que, si l'un ne change pas de nom, l'autre non plus. Mais les questions d'identité sont, à mes yeux, très importantes aussi.
Qu'est-ce que l'identité ? On a beaucoup causé sur l'identité nationale, comme référentiel imposé ou choisi par les individus. L'identité légale sert à reconnaître les personnes. De même, l'identité personnelle regroupe les caractéristiques qui font qu'on se fait reconnaître des autres et de soi-même, à se définir. Cela regroupe nos caractéristiques physiques, notre histoire personnelle, notre tempérament... Et le nom, avec l'histoire familiale qu'il transporte, avec les souvenirs de notre enfance qui y sont attachés, fait partie de notre identité. Changer de nom revient à substituer l'histoire d'une famille étrangère à la sienne, et à abandonner une partie de son histoire personnelle passée.
Je conçois l'attribution d'un nom comme une prise de possession. En verbalisant les choses, on se les approprie. Quand un découvreur arrive sur une nouvelle terre, il la baptise. Quand un enfant reçoit un jouet, il le baptise, et il appréhende le monde entre autres en apprenant le nom des choses. Quand vous adoptez un chien, votre nom de famille apparait sur son carnet de santé. Les conquérants et dictateurs aiment changer le nom des villes et des Etats qu'ils gouvernent. A la naissance d'un enfant, on lui donne un prénom, et on choisit son nom de famille. C'est une manière de dire "c'est MON enfant", une manière de le reconnaître. Je laisse aux religieux le soin de relier ces idées aux notions de baptème et du Verbe au sens chrétien.
Dans ce contexte, changer son nom et donner son nom à quelqu'un revêt une signification particulière qui peut être violente et avilissante. Par le changement d'identité, on annihile celle qu'on était avant le mariage et on change de famille. De la même manière le père "perd" sa fille en la mariant, car elle ne porte plus son nom et ne lui appartient plus ; l'époux, lui gagne le droit de dire que son épouse est SA femme. C'est, finalement, toute la signification du mariage en tant qu'institution traditionnelle rétrograde qui ressort dans le changement de nom.

Est-il besoin de préciser quel nom j'utilise ? ;-)

samedi 22 janvier 2011

Comment fabriquer une femme ? - Manuel à l'usage des mères - 1. La petite enfance

Voici la première partie du Manuel à l'usage des mères dont j'avais donné une introduction il y a quelques semaines. J'ai finalement modifié la structure générale du manuel et répercuté cette modification dans l'introduction.


A. Les repères à donner
Au cours de la petite enfance, votre fille apprendra à adopter grossièrement les traits de caractères qui sont recherchés chez une femme.
Ces traits lui permettront de séduire durablement les hommes, pas seulement son futur compagnon, mais aussi son entourage qui attend d'elle qu'elle soit agréable à regarder et à côtoyer. Séduire doit devenir un réflexe pour elle.
Il conviendra également de lui inculquer les qualités qui feront d'elle une bonne mère et une bonne maîtresse de maison, de manière à ce que les activités domestiques deviennent pour elle une priorité et qu'elle s'y livre par réflexe. La petite enfance est la période au cours de laquelle elle apprendra, sinon les méthodes, l'importance que prendront les tâches domestiques dans sa vie.
Les hommes produisent activement, les femmes reproduisent passivement. Votre fille doit apprendre à être passive, patiente et sage. Elle doit apprendre à se sacrifier devant les impératifs masculins. Elle doit découvrir l'importance de l'apparence, de la beauté, pour une femme.

B. Les outils
Les enfants en bas âge n'adoptent pas un comportement correspondant à leur genre spontanément. Sans encouragements et interdictions de la part de leurs parents et éducateurs, les filles ne répugnent pas à jouer avec des voitures ni les garçons avec des accessoires de cuisine. Il s'agit donc de les aiguiller : manifestez votre enthousiasme lorsque votre fille joue avec sa poupée et votre indifférence, voire votre réprobation, lorsqu'elle prend un jouet de garçon. Imposez-lui d'être sage avec fermeté, plus qu'avec un garçon dont on attend qu'il soit turbulent. N'hésitez pas à affirmer devant elle que les filles sont toutes sages, bavardes, minutieuses... Votre parole est vérité pour elle et elle étouffera volontairement tout comportement l'empêchant d'entrer dans le cadre que vous lui avez fixé.

Les poupées de type poupon ont une importance cruciale dans l'apprentissage de son rôle de mère comme des valeurs de douceur et de tendresse. Demandez-lui régulièrement où est "son bébé" (l'appeler "bébé" plutôt que "poupon" le personnifiera), enjoignez-lui de s'en occuper, de le câliner. Si elle refuse, n'insistez pas mais n'oubliez pas de dire que c'est dommage, lancez un "pauvre bébé !" pour la culpabiliser. Elle doit apprendre à considérer que les enfants sont sa responsabilité.
D'autres poupées représentant des petites filles sont également disponibles. Il faut qu'elle puisse s'identifier à ces poupées, pour qu'elle acquière l'attitude passive qu'on attend d'elle. Ces poupées, mignonnes et charmantes, lui prouveront l'importance de l'esthétisme, en particulier de la tenue. De plus, la manipulation de telles poupées avec les accessoires fournis lui donneront l'habitude de manipulations patientes et minutieuses, chose indispensable aux soins de la maison et des nourrissons. Elle prendra goût aux travaux manuels plutôt qu'aux activités viriles requérant de la force et de l'énergie.

Le choix des jouets n'est pas suffisant : il faut lui créer un univers dans lequel elle évoluera tout au long de son enfance et qu'elle recherchera toute sa vie. La décoration de sa chambre est une étape cruciale dans son éducation. L'utilisation outrancière de la couleur rose, déclinée dans tous les tons possibles, réduiront son imaginaire à cet univers féminin et garantiront qu'elle restera confinée dans son monde de fille. Des objets évoquant la nature sont à privilégier pour décorer sa chambre. Elle doit s'identifier à la nature dans ce qu'elle a de patient et de soumis à l'homme, de sécurisant, généreux et protecteur.
Vous imposerez fées et princesses dans son univers. Les princesses représentent un idéal de séduction, belles et élégantes, passives mais déterminées à atteindre leur but (le prince charmant), connaissant bien leurs priorités, prêtes à se sacrifier par amour. Le prince charmant est également l'idéal de l'homme recherché : il est fort (donc à même de protéger sa famille) et riche (il pourra l'entretenir ainsi que sa famille durablement). Les fées, quant à elles, lui donneront le goût du magique, du merveilleux, et de la fantaisie. La fantaisie fera d'elle une personne agréable, le magique la protègera contre le goût de la science et de la réflexion qui risquent de remettre en cause ce que vous lui inculquez.

C. Le doute et la séduction
Si les femmes admirent les hommes pour leurs qualités viriles qui leurs sont inaccessibles, les hommes n'admirent pas les femmes qui, bien qu'utiles pour maintenir l'équilibre du foyer, ne produisent guère d'avancées dont bénéficierait la société dans son ensemble. Ainsi, l'intérêt que vous portez aux activités de votre fille ne peut être partagé par votre mari.
Votre fille s'en rendra compte d'elle-même assez rapidement. Si ce n'est pas le cas, vous pouvez l'amener à cette conclusion en lui enjoignant de ne pas déranger son père avec ses activités de filles. Légitimement agacé par ses mièvreries, son père ne fera attention à elle que si elle remplit parfaitement le rôle qu'il attend d'elle, si elle est sage et jolie. Ce manque d'intérêt général et ce mépris larvé pour sa féminité feront naître une saine angoisse dans le cœur de la petite fille. C'est cette angoisse qui la poussera à exceller dans ses qualités féminines pour obtenir le reconnaissance paternelle à laquelle elle aspire. Elle s'efforcera d'être belle, douce, sage et gentille pour obtenir l'attention qui lui manque.
C'est donc cette angoisse, née dans sa petite enfance, qui fera d'elle la séductrice adulte qui attirera un bon mari. Attention néanmoins à ce qu'elle ne devienne pas névrose, ou que l'enfant ne devienne pas une enquiquineuse ! Dans ce cas son mari risque de ne pas rester auprès d'elle.


A suivre...

vendredi 21 janvier 2011

Moi, je suis pro-vie

J'apprends ce matin par un post de Sandrine sur son blog A dire d'elles qu'une manifestation "pro-vie" est prévue pour dimanche.
"Pro-vie", eux ? Mon œil, oui !
S'ils défendaient vraiment le droit à vivre, ils seraient POUR le droit à l'avortement. Comme Sandrine le démontrait il y a quelques mois, se définir "pro" quelque chose n'est qu'un procédé rhétorique douteux pour occulter un retour à un système patriarcal (enfin, un système encore plus patriarcal que celui qu'on a aujourd'hui, vu qu'on n'est pas encore sortis de l'auberge). Je ne suis pas non plus très enthousiaste à propos du terme "pro-choix", car avorter n'est pas un choix, c'est une nécessité à laquelle on ne se soumet pas de gaîté de cœur (sauf cas pathologique, mais c'est un autre problème).
Je suis enceinte de mon second enfant, et j'ai été gâteuse avec mon bidon, lors de mes deux grossesses, dès le test de grossesse positif. J'ai profondément désiré mes deux enfants et je les ai aimés avant même de les sentir bouger. Il m'est impossible d'imaginer sans horreur l'éradication volontaire d'un fœtus. D'ailleurs, je ne connais personne qui le puisse, je ne connais personne qui soit "pour l'avortement", qui trouve ça cool, qui se lève un matin en se disant "tiens, si je tuais mon bébé aujourd'hui !".
Et pourtant je suis pour le droit à l'avortement. Ce n'est pas parce qu'on ne comprend pas le choix d'une autre qu'il ne faut pas le respecter. Et puis rien ne dit que dans d'autres circonstances, plus tard, je ne serai pas conduite à faire la même chose !

Défendre la vie, c'est aussi défendre les mères
Il existe un fait que les "pro-vie" choisissent d'occulter : interdire l'avortement ne diminue pas le nombre d'avortement pratiqués. D'après Callixto des Chiennes de Garde, "une femme qui veut avorter le fera, dans n’importe quelle condition, quitte à mettre sa santé ou sa vie en danger, et quoi qu’en dise la loi."
Dans le monde 68 000 femmes meurent chaque année dans des souffrances épouvantables. Interdire l'avortement ne conduit qu'à augmenter dramatiquement le nombre de femmes qui meurent ou subissent des séquelles irréversibles d'avortements clandestins.
Interdire l'avortement revient à dire que ces femmes ne méritent pas de vivre, qu'elles doivent souffrir et mourir pour expier leur faute. Jésus lui-même ne se permettait pas un tel jugement, ne condamnait pas les femmes jugées fautives par leurs contemporains à une mort atroce. Si Jésus lui-même ne se permet pas de juger et condamner un être humain, quel chrétien peut se le permettre ? Où sont la pitié, le pardon, la compassion chrétienne, lorsqu'on préfère laisser ces femmes se faire charcuter l'utérus à l'aiguille à tricoter plutôt que leur permettre d'avorter dans des conditions décentes ?
Je me considère comme réellement pro-vie. Je suis pour sauver les vies de ces femmes, parce qu'elles aussi ont le droit de vivre. On ne peut pas sauver les fœtus (en tout cas pas en interdisant l'avortement !), c'est dommage, mais on peut sauver leurs mères. Interdire l'avortement, à mes yeux, c'est se rendre coupable de non assistance à personne en danger et de complicité d'actes de barbarie.

La vraie solution, c'est la contraception
Caroline de Haas , porte-parole d'Osez le féminisme, faisait remarquer dans une interview que l'avortement "est un événement fréquent dans la vie d’une femme, même avec une contraception. Avec une moyenne de 400 cycles, il est normal qu’il y ait quelques ratés." Quoi qu'il arrive, même avec une contraception efficace, on ne pourra pas éradiquer l'avortement.
Mais on peut en réduire la fréquence, en favorisant l'accès à la contraception. Ca marche, c'est prouvé : regardez le graphique ci-contre (source). On peut encore faire mieux en permettant à chacune d'avoir accès à une contraception libre et gratuite.
Non, en France, la contraception n'est pas libre. Les femmes ne sont pas assez informées sur les différents modes de contraception qui sont disponibles, et quand elles le sont, elles sont soumises à un suivi médical lourd. Les mineures sont particulièrement mal suivies.
Et la contraception, en France, est loin d'être gratuite. A part quelques pilules dosées pour les juments, la contraception n'est pas remboursée à 100%. Si vous voulez une pilule qui ne donne pas d'effets secondaires ou un autre mode de contraception, il faut casquer, des fois beaucoup, et toutes les femmes ne peuvent pas se le permettre.
Pour sauver les bébés, ceux qui se veulent pro-vie devraient donc d'abord lutter pour que chacun ait accès à une contraception libre et gratuite, pour que toutes les grossesses soient désirées et soient ainsi conduites à leur terme. Mais les "pro-vie", sur le sujet, je ne les entends pas trop la ramener... Par contre, quand il s'agit de faire de la désinformation dans les écoles, là, il y a du monde...

C'est bien beau de pondre des lois, il faut aussi les appliquer
En France, la loi Veil a été adoptée en 1974 et promulguée l'année suivante. On pourrait croire que c'est un droit acquis. Que nenni !
Avec les fermetures de centres d'IVG, les listes d'attente s'allongent au point qu'il devient difficile d'avorter dans les temps. Couper les moyens est un moyen simple d'entraver le droit à l'avortement : vous avez le droit d'avorter, mais encore faut-il y arriver ! Tout se passe comme si on faisait payer aux femmes leur choix en leur rendant difficile l'accès à l'avortement. Dalila Touami, permanente du Planning familial en Ile-de-France résume la situation : "L’IVG demeure une tolérance, pas un véritable droit."
Récemment, trois associations ont interpellé François Fillon quant à ce problème. Espérons qu'il saura voir clair à travers la désinformation des faux "pro-vie".



P.S. : Mon post est agressif, j'en conviens. Je tiens à préciser que les commentaires sont modérés et que je ne publierai aucun commentaire insultant ou agressif à mon égard, ni un commentaire contre le droit à l'avortement (sauf s'il est rédigé de manière courtoise et présente un argument que je m'attèlerai avec délices à démonter). C'est pas juste, mais je m'en fous.

mercredi 19 janvier 2011

Le diplôme, l'amour et les enfants : quand l'INED décrit une société toujours patriarcale

Radio, télé, presse, web, les études de l'INED sur les données recueillies par les derniers recensements ont fait le tour des médias. L'Institut a étudié les évolutions des familles depuis 2000 et souligné l'influence du niveau de diplôme sur la fécondité et les unions.

Sur la fécondité
Au cas où vous en douteriez encore, l'INED nous rappelle que les enfants, c'est une affaire de femmes. La fécondité est quantifiée par un nombre d'enfants par femme, on étudie l'influence du niveau de diplôme des femmes sur la natalité... Les papas ? Quelle importance ! On me dira qu'il faut bien mettre en place une norme qui regroupe tous les cas, étant donné que les papas peuvent se barrer ou que le père n'est pas forcément celui qu'on croit. Ce qui veut dire qu'une mère ne peut en aucun cas se barrer. Et puis on ne réfléchit même pas à une solution de rechange : on pourrait parler d'enfants par ménage, ça ne changerait rien au résultat. Parler systématiquement d'enfants par femme revient à renforcer l'idée que l'enfant n'appartient qu'à sa mère, pas au père, qui ne peut donc pas en avoir la garde. Il s'agit d'une vision rétrograde et sexiste de la famille qui lèse tout le monde.
Passons. Que nous apprend cette étude ?
  • La France présente toujours une forte natalité par rapport à ses voisins, avec ses 2 enfants par ménage. Ca viendrait de la politique du mode de garde, qui dispense les femmes de choisir entre famille et travail. Mouais... Je suis en recherche de nounou pour mon futur bébé, je n'ai pas l'impression que ce soit si simple... Sans compter les pressions qu'on subit tout au cours de notre carrière. Je veux bien admettre qu'on est mieux loties en France qu'ailleurs, mais vu le nombre de gosses pas gardés, il n'y a pas de quoi être fiers.
  • Plus les mères sont diplômées, plus leur premier enfant naît tard. L'âge moyen à l'accouchement et l'âge de la mère au premier enfant augmentent avec le niveau de diplôme. Sans blague. On ne fait pas de môme pendant ses études ni pendant les 3 premiers CDD précaires qui nous font débuter notre carrière ? Comme c'est bizarre ! De plus, je lis sous la plume de France Prioux, de l'INED : "les femmes non diplômées investissent très tôt dans la famille et donc font des enfants très tôt". Je pense plutôt qu'étant donné qu'on nous rabâche que les femmes doivent avoir leur premier enfant avant 30 ans, celles qui ont les moyens de le faire le font.
  • Les femmes moins diplômées ont une fécondité plus élevée que les plus diplômées. Ca aussi me parait évident. Plus on s'y prend tard, moins on a le temps d'en avoir. On pourrait aussi penser que les jobs des femmes diplômées prennent trop de temps pour qu'elles puissent se permettre d'avoir trois enfants, mais je n'ai pas de preuves. Dire qu'elles maîtrisent mieux la contraception me parait condescendant pour les femmes peu diplômées. On pourrait aussi conclure que les femmes diplômées ne ressentent pas autant que les autres le besoin d'avoir des enfants, mais ça me parait vraiment stéréotypé. Bref, il faudrait étudier vraiment les causes de ce phénomène pour pouvoir conclure avec honnêteté.
  • Les femmes étrangères contribuent peu à la natalité. Désolée de décevoir les racistes : nous ne sommes pas envahis par des hordes d'étrangers qui se reproduiraient comme des lapins pour toucher nos allocs.

Sur les unions
Là, enfin, on se rend compte qu'il faut être deux pour faire un couple. Mais la forme du couple reste profondément patriarcale : avec un diplôme, un homme se case facilement, une femme moins.
Ceci tend à prouver que les hommes cherchent une partenaire moins diplômée pour se trouver en situation de supériorité. A moins que les femmes diplômées ne préfèrent garder du temps pour elles et leur carrière que convoler ? Je ne lis guère cette explication dans la presse : il semble que, quand il s'agit de convoler, l'homme pioche dans le "marché matrimonial".
En tout cas, les femmes, diplômées ou non, cherchent un prince charmant capable d'assurer leurs revenus. Qui plus est, les femmes peu diplômées ont tendance à rester plus en couple que les autres, de peur d'une vie précaire. Choisir une femme peu diplômée pour un homme présente donc aussi l'avantage d'être sûr de la garder, puisqu'elle reste dépendante financièrement.
Rien de nouveau en France, donc. Comme le sexe, l'amour inclut un rapport dominant/dominé sans lequel nos concitoyens ne semblent pas pouvoir construire une relation.

mardi 18 janvier 2011

L'Echange

Il y a des films qu'il faut éviter de voir quand on est une maman poule. L'Echange en fait partie. J'en ai fait l'expérience hier soir, avant une longue nuit d'insomnie.
Ca faisait longtemps que j'avais envie de le voir, l'idée de départ m'intéressait beaucoup : comment peut-on ramener à une femme un enfant qui n'est pas le sien, comment réagira-t-elle, comment peut-elle s'en sortir ? Finalement, quand on visionne le film, toutes ces questions sont secondaires et s'inscrivent dans des perspectives beaucoup plus vastes. A condition d'avoir les yeux en face des trous.
Je ne m'étendrai pas sur la mise en scène (je n'y connais rien), ni sur la performance d'actrice d'Angelina Jolie (je ne suis pas objective avec les sex-symbols siliconés). C'est le scénario qui m'a scotchée. J'ai lu un critique dire que l'histoire était trop grosse pour passer. Pourtant le scénario est basé sur un fait réel et le scénariste a utilisé de nombreuses archives d'époque.
Ne vous laissez pas convaincre par les médias qui essaieront de vous vendre un film présentant "une fâââme forte" ou "le combat d'une mêêêre". Ces bêlements traduisent la croyance en une essence féminine intrinsèquement faible et en une maternité toute-puissante, deux absolus contradictoires qui ont condamné Christine Collins. Ces perspectives du film sont donc absurdes et vont à rebours de ce qu'il démontre.

C'est donc l'histoire d'une mère célibataire, Christine Collins, qui vit à Los Angeles dans les années 20. Elle occupe un poste de manager dans un central téléphonique, chose qui, à l'époque, ne va pas de soi : son patron se félicite de l'avoir nommée malgré l'opposition générale qui considérait qu'une femme ne pouvait occuper ce poste. Christine Collins a un fils de 9 ans, Walter, qui disparait au début du film. La police attend 48h avant de se lancer à sa recherche, croyant que, dans la plupart des cas, les mômes reviennent tout seul. Quand on pense à ce qui a justifié l'instauration des alertes enlèvement d'aujourd'hui, ça fait froid dans le dos.
Au bout de 5 mois, on ramène à Christine Collins un enfant qu'elle ne reconnait pas. La police lui dit qu'elle est sous le choc, et qu'en 5 mois un enfant change. Le petit prétend s'appeler Walter Collins et connait son adresse. Christine le ramène chez elle, trop bouleversée pour remettre en cause les dires de la police. Mais l'enfant est 5cm plus petit que Walter et, au contraire de ce dernier, il est circoncis. La police fait alors appel à un médecin qui assure que l'enfant, sous le choc de l'enlèvement, a subi un tassement vertébral (de 5cm, bien sûr...) et que son ravisseur a dû le circoncire (je m'attendais sérieusement à ce qu'il lui dise que c'était tombé tout seul tant ce toubib transpire la mauvaise foi). Il finit par reprocher à Christine son rejet de l'enfant et l'accuse de lui infliger des dommages psychiques (on nie votre discernement et on vous culpabilise... classique !).
Christine s'obstine : elle a bien compris que la police voulait pouvoir dire aux médias que l'affaire était résolue, et veut que l'enquête reprenne pour ramener Walter. Le dentiste et l'institutrice de de Walter témoignent que l'enfant n'est pas celui qu'il prétend être. Christine est alors contactée par un prêcheur médiatique qui lui propose de passer à la radio pour exposer son cas. La police tente alors de l'intimider, l'accusant de ne plus vouloir être mère après 5 mois sans enfant, puis, ne pouvant la convaincre, la fait interner. A l'hôpital, Christine rencontre des femmes tout à fait saines d'esprit qui ont été internées car elles gênaient la police. Leur rébellion supposée contre l'autorité est prise par les médecins comme signes de folie et comme prétexte à des traitements relevant plus de la torture que de la médecine.
Je m'arrête là pour ne pas dévoiler les développements les plus surprenants du film. Attention tout de même, il y a des scènes très difficiles !

Parce que l'on croit que les émotions des femmes obèrent leur discernement, médecins et policiers se sont arrogé le droit de chercher à briser Christine Collins, sous prétexte de la protéger d'elle-même, et de protéger les autres de ses méfaits supposés. La critique de Prairie Miller (en anglais) souligne la véracité des événements relatés et rappelle leur contexte.
Les violences ne sont pas seulement exercées par la police envers les femmes : les enfants aussi en sont victimes. Eux non plus ne sont pas compris, ni écoutés, ni respectés ; on leur fait dire ce qui arrange l'autorité, on les rudoie pour les remettre à leur place. La violence imposée au nom de la justice est crûment montrée, cette vision culminant avec une scène d'exécution particulièrement réaliste.

On ne peut que remercier Clint Eastwood d'avoir contribué à faire connaître cette histoire, qui a été exhumée par chance par un employé de mairie chargé de faire un nettoyage de printemps.

dimanche 16 janvier 2011

Intervention du Dr. Muriel Salmona

On lit plein de choses intéressantes sur le blog du Dr. Muriel Salmona. Elle est psychiatre-psychothérapeute spécialisée en psychotraumatologie, responsable de l'Antenne 92 de l'Institut de victimologie et présidente de l'association mémoire traumatique et victimologie.

Le compte-rendu de son intervention au cours de la journée de l'Amicale du Nid vient d'être mis en ligne. Il était question des violences sexuelles dans la prostitution et j'y ai relevé quelques faits que je trouve importants.

"Au cours de la situation prostitutionnelle, les personnes vivent des violences très graves et multiples. Les chiffres sont énormes : 71% de violences avec dommages corporels, 63% de viols, 64% de menaces avec armes, 75% de personnes sans domicile fixe et 89% de personnes qui veulent sortir de la prostitution."
La plupart des personnes prostituées ont subi des violences sexuelles avant d'entrer dans la prostitution. Pour comprendre comment ces violences peuvent conduire, assez paradoxalement, les victimes à la prostitution, le docteur rappelle que "plus de 80% des personnes qui subissent des violences sexuelles peuvent présenter des risques psycho-traumatiques sévères qui peuvent durer toute une vie. Ce risque est de 23% pour les risques traumatiques autres (tremblement de terre par exemple), il est de 60% pour les violences conjugales. [...]
Plus on subit de violences, plus il y a de risques d'exercer des violences contre soi ou autrui, car c'est une surte de tentative d'auto-traiter des troubles psycho-traumatiques non pris en compte."
Je vous encourage à lire la suite qui est très instructive.

A lire aussi, si ce n'est déjà fait, son article sur les violences sexuelles. Elle y décrit les traumatismes consécutifs aux violences sexuelles, relevant qu'ils sont identiques à ceux vécus par les victimes de traumatismes de guerre, avant de rappeler les effarantes statistiques sur le viol.

jeudi 13 janvier 2011

Sugar baby love

Ca fait longtemps que j'ai une dent contre ceux qui travaillent dans le domaine médical. Non pas que je les juge massivement incompétents ni que je considère qu'ils sont tous idiots (j'en connais qui sont super, et d'ailleurs je les garde, quitte à faire 30 km pour me faire soigner une carie), mais j'en ai connu tellement qui traitent leurs patients comme des imbéciles ou manquent totalement d'empathie que j'en viens à être méfiante dès que je passe la porte d'un hôpital et à ne plus tellement faire confiance aux médecins, sage-femmes et infirmiers que je croise. Ce qui est un rapport vachement constructif, vous en conviendrez.

C'est ce billet de la Poule Pondeuse et les commentaires qu'il a générés qui me donne envie de vous raconter ma laïfe (encore une fois). En fait, ça faisait longtemps que j'avais envie de raconter mes tribulations liées au diabète gestationnel, histoire de vider mon sac, et de montrer qu'il y a des gens qui sont vraiment handicapés du quotient émotionnel. Si en plus d'autres femmes peuvent se retrouver dans mon témoignage et être rassurées...

Lors de ma première grossesse, il y a 4 ans, la seconde échographie a révélé un bébé un peu gros. Comme j'ai des antécédents de diabète dans la famille, j'ai dû passer le fameux test du O'Sullivan (j'aurais préféré les boissons du O'Sullivan qui est à gauche...) puis, comme il était positif, le HGPO. Evidemment, on ne m'a pas tellement donné d'explications, on m'a juste dit qu'il fallait le faire pour mon bébé. Or, avoir des antécédents d'une maladie dans la famille, ça veut dire vivre toute sa vie dans l'angoisse de tomber malade, culpabiliser à chaque écart et subir les recommandations inquiètes de tout plein de gens bien intentionnés. Passer des tests de 1 à 4 heures dans ces conditions, c'est terriblement anxiogène. A la réception des résultats (bingo ! les seuls tests que je réussis à tous les coup, c'est ça et les tests de grossesse !), j'ai pleuré comme si on m'avait annoncé un cancer. Ca peut paraître ridicule, mais avec cette angoisse déjà latente qui est montée au fil des jours et le manque d'informations, j'ai complètement craqué.
A la réception des résultats, mon gynéco m'a envoyée voir une endocrinologue qu'il connaissait. Elle ne m'a donné aucune information utile sur l'alimentation à suivre. Je lui ai dit avoir banni le sucre de mon alimentation, en particulier en ne buvant que des sodas light au lieu du Coca, ce qu'elle m'a reproché : le light donne envie de sucre. Je suis restée sans voix : si j'ai envie de sucre, je vais forcément me taper une tablette de chocolat ? Elle a fait de la pub pour le Pulco citron avant de me pourrir car je n'avais pas l'air assez catastrophée à son goût. Quand ses accusations ont déclenché mes larmes, elle a décidé que mon travail me stressait trop et m'a arrêtée jusqu'à la fin de ma grossesse. J'aimais mon travail, je m'y sentais bien, et être arrêtée m'a fait l'effet d'une punition. Je suis rentrée en RER en chialant comme une damnée, et j'ai pleuré toute la journée. Le soir, mon mari, n'arrivant pas à me calmer, a appelé mon gynéco en urgence et obtenu le nom d'un autre praticien chez lequel nous avons pris rendez-vous immédiatement.
Cette nouvelle endocrinologue, au vu des résultats de mes examens, m'a rassurée et m'a conseillé un régime. Elle m'a donné des livres, étonnée que sa collègue ne m'aie rien dit. J'ai continué à travailler avec bonheur, et j'ai été suivie par cette praticienne jusqu'à la fin de ma grossesse. Mon gynéco m'a assuré qu'il n'enverrait plus jamais de patiente chez l'autre naze.
J'ai suivi scrupuleusement mon régime et j'ai passé quatre mois à avoir faim à chaque instant de la journée. Je pleurais en voyant mon assiette, sachant qu'elle ne me rassasierait pas. Et aucun praticien, parmi tous ceux que j'ai vus, n'a proposé de solution. Pire, une sage-femme en a ri, comme d'un petit désagrément de la grossesse pas très grave, puis m'a prescrit de nouveaux examens pour s'assurer que mon régime suffisait : non seulement elle niait mon profond malaise, mais elle me culpabilisait en supposant que je n'en faisais pas assez.
Mon fils est né à terme et en très bonne santé. On me dira que si je n'avais pas bien suivi mon régime, il y aurait sans doute eu des complications. C'est sans doute vrai, mais en attendant, je garde de cette grossesse un très mauvais souvenir, où j'ai été traitée comme une irresponsable et affamée sans que personne ne se soucie de mon mal-être.

J'ai gardé l'habitude de faire attention à ce que je mange, en me servant des informations que j'ai apprises. J'ai la chance de ne pas prendre de poids facilement, et lorsque je suis retombée enceinte, manger simplement équilibré (et à ma faim !) m'a permis de ne pas grossir. Aujourd'hui, je suis à 7 mois de grossesse, et je n'ai pris que deux kilos. Je vois toujours le même gynéco, vu qu'il est quand même très sympa et ne multiplie pas trop les examens. Maintenant qu'il me connait, d'ailleurs, nous communiquons plutôt bien.
J'ai passé le test de l'OMS qui a révélé que j'étais de nouveau en situation de diabète gestationnel. C'est peut-être parce que bébé n'est pas trop gros que mon gynéco ne m'a pas envoyée voir de spécialiste. Il m'a confié un appareil pour surveiller ma glycémie (à gauche), me disant de l'utiliser de temps en temps et que, si j'étais systématiquement au-dessus des limites, on passerait à l'insuline. Je dois simplement limiter les quantités de sucre que j'ingurgite.
Je mange deux fois plus que lors de ma première grossesse, et l'appareil m'a permis d'établir que ces quantités me permettent de rester bien en-dessous des limites acceptables. Je fais bien plus de tests que ce que le gynéco me demandait, et je note tous les résultats pour optimiser mon régime, même si j'ai mal au bout des doigts à force de me piquer (c'est pas très pratique pour taper sur mon clavier !). Je mange à ma faim, bébé conserve un poids normal et je ne grossis toujours pas. De temps en temps je me permets un écart, vu que ces écarts ne modifient visiblement pas le poids de bébé, avec l'aval de mon gynéco qui convient que ça permet de garder le moral, ce qui est important pour une future maman. C'est marrant, mais ne pas pouvoir manger de sucre a quelque chose de déprimant !
Il y a quelques jours, j'ai passé une échographie à l'issue de laquelle le médecin m'a envoyée passer un monitoring pour rien. Je n'ai évidemment pas caché la situation à la sage-femme en charge du monitoring. Elle s'est étonnée de la faible fréquence de mes relevés de glycémie, m'a demandé d'en faire 6 fois par jour (mais bien sûr, tu me prêtes tes doigts ?) et de montrer les résultats à une sage-femme avec laquelle je devais prendre spécialement rendez-vous (et vlan, on vous culpabilise parce que vous n'en faites pas assez, et on vous flique parce que vous n'êtes pas capable de vous prendre en main).
Ce soir-là, après une journée de travail, j'avais attendu une heure pour passer mon échographie, une demi-heure pour le monitoring, une autre demi-heure sous la machine, alors que mon fils et mon mari m'attendaient dehors, et j'avais subi un toucher vaginal long et douloureux : forcément j'avais des contractions. Le gynéco de garde (qui se trouvait être le mien !) m'a examinée en urgence, a vu que tout allait bien et m'a renvoyée à la maison avec un arrêt de travail que cette fois j'ai accueilli avec reconnaissance. On m'a donc refait le coup du "on te stresse à mort, on te fatigue, on te prend pour une imbécile voire une irresponsable, puis on te met en arrêt de travail".

C'est pas grave, tout ça, il y a des gens qui vivent toute leur vie avec le diabète ou pire, et qui font ce qu'ils ont à faire sans se plaindre, mais c'est rageant de voir le nombre de personnes dans le milieu médical qui, à aucun moment, ne se soucient de votre bien-être, de votre état psychologique, et appliquent bêtement des procédures en arborant une assurance désarmante. Je veux bien croire que certaines patientes ne sont pas malines et que dans le doute il vaut mieux nous pousser à faire attention, mais ne serait-il pas plus respectueux des personnes de leur faire confiance, ou tout du moins de dialoguer un peu pour s'assurer qu'on peut leur faire confiance ? Au lieu de ça, on nous accable d'examens, on nous stresse, on nous fatigue, on nous culpabilise sans se soucier des conséquences sur notre santé et celle du bébé. Belle mentalité !

mercredi 12 janvier 2011

Aie confiance en toi, sois belle !

Ceux qui n'ont pas connu le chômage n'en ont peut-être pas conscience, mais chercher un emploi sans succès pendant une longue durée fait peu à peu perdre sa confiance en soi. Les refus et, pire encore, les camdidatures sans réponse éliment l'ego. On commence par se demander pourquoi on n'est jamais pris, et à la fin, on finit par conclure que la candidature qu'on propose n'est peut-être pas assez méritante. Partant de là, pourquoi persévérer ? On poursuit par des candidatures sans conviction, sans ambition, qui évidemment ne satisfont pas les employeurs.
Pour une femme qui a tendance à se dévaluer, qui entend régulièrement qu'elle sera de toute manière payée moins, que son salaire n'est qu'un salaire d'appoint du couple... c'est d'autant plus difficile de s'en sortir.

Le Pôle Emploi est bien conscient de ce cercle vicieux. Une journée d'action visant spécifiquement les femmes a donc été lancée. Le but ?
"Femmes en recherche d’emploi : regagner l’estime de soi à travers un travail sur son image, apprendre à se présenter, à s’exprimer devant un futur employeur mais aussi savoir convaincre sans stress."
Belle initiative ! Le travail sur l'image est un outil très utile pour optimiser sa communication, et en étant conscient de sa capacité à s'imposer physiquement, on gagne en confiance en soi et on diminue d'autant son stress. J'ai fait deux formations très profitables, d'ailleurs, un cours de théâtre (se poser physiquement, parler sans effort, gérer son stress) et une formation visant à mettre en évidence mes compétences (pour cela, il faut déjà prendre conscience qu'on en a, et ça fait du bien).
Quel outil, parmi la myriade disponible, le Pôle Emploi a-t-il choisi d'offrir spécifiquement aux femmes ? Un travail sur le CV ? Sur l'expression orale ? Hé ben non !
Asseyez-vous, posez votre café loin du clavier, respirez un bon coup. Il s'agit de journées relooking. Elles seront proposées une fois par mois pendant un an. Au programme : soins de la peau, maquillage, manucure, coiffure... Au passage, les participantes causeront avec un DRH de leur carrière et recevront des conseils. La formation est proposée en association avec le Fonds de dotation EREEL qui est, entre autres, marrainé par Marie-Anne Chazel (ouah, la classe !). D'après le visuel proposé sur le site de l'EREEL (ci-dessous), ça permettra aux femmes pauvres de bosser dans un boudoir bien chauffé, les pieds sur le bureau, en arborant un sourire niais.

Visuel associé à la formation présentée sur le site de l'EREEL (Crédit photo : Bureau d'image Cynthia Cohen).

Le Pôle Emploi considère donc que la confiance en elle d'une femme réside dans la maîtrise de son apparence. Ca me fait penser aux soins de beauté proposés auc femmes de la prison de Strasbourg : une question de dignité, qu'ils disaient.
D'accord, pour un recrutement, l'apparence compte. Mais les compétences sont plus importantes, non ? Offrir une formation complémentaire pour faire acquérir ou consolider les compétences des candidates, leur apprendre à mettre ces compétences en valeur, ce serait utile aussi pour leur confiance en elles. Mais le Pôle Emploi préfère visiblement conforter les chômeuses dans leur idée que leur apparence prime sur leurs compétences.
Au fait, c'est financé comment, le Pôle Emploi ? Encore un bel exemple d'utilisation de nos deniers publics...

dimanche 9 janvier 2011

Laïcité sélective bis : le halal

La Cène, Léonard de Vinci : ils ont mangé casher, non ?

Je poursuis ici mes réflexions initiées dans le billet précédent.

Tout récemment, une campagne de la Fondation Brigitte Bardot qui dénonce l'abattage rituel (comprendre halal et casher) comme provoquant des douleurs innommables chez la bête m'a interpelée. Venant de Bardot, on peut se demander si c'est bien de protection des animaux qu'il s'agit, d'autant plus que d'autres méthodes d'abattage couramment utilisées en France (notamment l'abattage du cochon) ou les conditions d'élevage des volailles pour le foie gras n'ont jamais été dénoncées par la Fondation avec une telle vigueur.
Après une recherche rapide sur les conditions d'abattage des animaux, j'ai bien l'impression que l'abattage rituel n'est pas le seul type d'abattage qui pose problème. Pour le bien des animaux qui est censé être l'objectif de la Fondation, il est indispensable de lancer une réflexion de fond sur la question. Mais voilà, quand il s'agit de bouffe comme pour le reste, c'est deux poids, deux mesures : pas touche à notre patrimoine boustifaillesque, pas de remise en question, alors que quand il s'agit du halal et du casher (notez que les Juifs prennent aussi au passage, comme quoi l'antisémitisme fait encore des étincelles), les critiques fusent. Que ces critiques soient justifiées ou non, je n'en sais rien, et ce n'est pas la question : si c'est vrai, il faut aussi dénoncer le reste, c'est tout ce que je demande.

Autres polémiques visant directement les musulmans : le service de viande halal dans certains Quick et dans les cantines. Là, le tollé est provoqué par ceux qui considèrent que le halal leur est imposé et qui réclament le libre choix. J'imagine que, si c'était possible, halal et non halal cohabiteraient en cuisine, je suppose donc que les cuistots ne sont pas stupides et que, si un restau fait du halal, il ne doit faire que ça. Si j'ai tort, je reconnais que mon raisonnement ci-dessous ne tient pas.
Sans halal dans les Quick, particulièrement ceux implantés dans des zones où une grande partie de la population est musulmane, ce sont les musulmans qui n'ont pas le choix : pas de Quick pour eux ! Le libre choix du non-musulman est-il donc plus important que celui du musulman ? C'est d'autant plus absurde que, face au Quick halal, le non-musulman amateur de burgers a toujours le choix : manger un burger halal qui, comme disait mon grand-père, ne va tout de même pas lui boucher le trou du c*l (les artères, je dis pas...), aller dans un Quick non halal, ou aller chez un concurrent. Ca fait 3 alternatives : dire que le halal s'oppose au libre choix est quand même culotté.
Dans les cantines, même chose : vaut-il mieux laisser les gamins musulmans jeûner ou servir du halal ? D'ailleurs, en parlant de cantine, je consulte régulièrement le menu de la cantine de mon fils : dans ma ville, la cantine sert du poisson tous les vendredis. C'est bien utile pour les petits chrétiens qui peuvent manger autre chose que des légumes le vendredi, mais rien que pour faire ch*er le monde, j'ai bien envie de me plaindre pour que, au nom du libre choix, on aie de la viande le vendredi, ou le choix entre les deux. Il n'y a pas de raison que les chrétiens imposent leurs habitudes alimentaires à ma famille ! Ici encore, deux poids, deux mesures ! Sur le poisson le vendredi à la cantine, silence radio, alors qu'un steak halal provoque un tollé.

De toute façon, le seul régime alimentaire qui soit vraiment bon pour l'esprit, c'est le régime pastafarien.


samedi 1 janvier 2011

Laïcité sélective

Je dénonçais récemment le féminisme instrumentalisé pour cacher des revendications islamophobes. Mais le féminisme n'est pas le seul dans ce cas : il y a aussi la laïcité.
L'excellent site Prochoix a repris un billet de M. Jo au sujet de la messe de Noël. Que le service public diffuse la messe de Noël, c'est déjà un scandale en soi. Mais diffuser sans état d'âme une célébration au cours de laquelle un discours anti-avortement est prononcé, c'est absolument insupportable. Pour preuve, je cite l'homélie en question :
"Chaque enfant né ou à naître a une dignité unique et mérite un grand respect, car il est créé à l'image de l'Enfant de la crèche. Comme il est douloureux de constater que des millions d'avortements sont commis chaque année dans le monde, à cause de l'égoïsme et de la dureté de cœur, à cause du rejet de la vie qui commence dès les premiers instants de la conception. Et comme il est douloureux de penser aux souffrances de qui commet de telles actions : ce sont des blessures qui détruisent les personnes au plus profond de leur être. Ces personnes ont besoin d'être aidées et de s'en remettre au Dieu de miséricorde."
Gerbant.

Au nom de la laïcité si chère à nos concitoyens quand il s'agit de se défendre contre les hordes de musulmans qui nous envahiraient, cet événement devrait provoquer un énorme scandale. Mais qui en parle ? En tout cas, pas les grands médias. Faisons une expérience simple : avec Google actu, j'effectue une recherche avec les mots-clé "messe+noel+avortement" : parmi les 16 réponses, seul le site Prochoix s'indigne de l'affaire. J'effectue maintenant une autre recherche avec "rue myrha" : j'ai cette fois 40 résultats ; "voile islamique" donne 164 résultats. A cela s'ajoutent les multiples émissions de télé sur le sujet.
Avec l'affaire de l'enseignant de Manosque qui a milité contre le droit à l'avortement à l'aide de tracts mensongers et d'une vidéo violente, c'est la même chose. Quand un imam appelle à la violence, ça fait du grabuge, ce qui me parait normal. Mais quand un prof traumatise une classe et remet en cause un droit acquis, personne ne bronche.

Je suis agnostique, et je défends la laïcité, car sans ce principe nous ne pouvons pas vivre tous ensemble. Mais j'en ai raz-le-bol de voir la laïcité écorchée par le catholiscisme dans l'indifférence générale et que l'islam provoque de telles levées de boucliers. Tant que notre société pratiquera cette politique du deux poids, deux mesures, nous ne vivrons pas dans une société laïque, mais dans une société raciste.

Image : La Nativité de Georges de la Tour (1593 - 1652).